Le principal aéroport tunisien, Tunis-Carthage, est paralysé par l’absence de moyens de transport publics. Sans aucune connexion ferroviaire, seuls les taxis individuels peuvent transporter les voyageurs à partir de cet aéroport.
Alors que la Tunisie s’apprête à accueillir une nouvelle saison touristique prometteuse, tous les yeux sont rivés sur les préparatifs y afférents.
En effet, selon les déclarations des parties officielles, le ministère du Tourisme en l’occurrence, de très bons indicateurs marquent la saison touristique, de quoi s’attendre à un afflux conséquent de visiteurs.
Toutefois, et autant le rappeler, le secteur touristique est toujours exposé à des problèmes structurels et reste tributaire de la performance des secteurs liés, à l’instar des transports aérien et terrestre.
Outre le transport aérien limité par une infrastructure vieillissante, la saturation du principal aéroport de Tunis-Carthage, la situation financière délicate de Tunisair, en Tunisie, le réseau routier est correctement maillé, mais souffre d’un manque d’interconnexion entre les régions, avec une polarisation extrême autour du Grand Tunis, laissant les touristes face à l’unique choix de dépendre des agences de voyages et de celles de locations de voitures.
Mais encore, le secteur touristique doit relever des défis structurels majeurs pour réduire sa saisonnalité et diversifier son offre.
Depuis des décennies, le tourisme est un moteur de l’économie tunisienne, attirant des millions de visiteurs chaque année grâce aux plages pittoresques, aux sites archéologiques et au riche patrimoine culturel de la Tunisie. Cependant, malgré ses atouts indéniables, le tourisme tunisien est loin d’être à l’abri des turbulences.
L’un des principaux défis auxquels le secteur est confronté concerne, en effet, les infrastructures de transport. Les aéroports nationaux, bien que nombreux nécessitent une modernisation pour mieux répondre aux normes internationales et améliorer l’expérience des voyageurs.
Le tourisme, une expérience individuelle
Pareillement pour le transport terrestre. Les réseaux routiers existent mais manquent souvent de transports publics efficaces et interconnectés. Outre un service de location de voitures pas très performant, ce qui en ajoute une couche aux difficultés des visiteurs souhaitant explorer le pays, hors des circuits touristiques préétablis, dominés par les agences de voyages.
Dans le monde entier, les habitudes de consommation de l’offre touristique changent. Le tourisme, souvent perçu comme une activité collective, s’avère de nos jours une expérience profondément individuelle, avec une quête d’aventure. Chaque voyageur vit et ressent son périple de manière unique, pour façonner des souvenirs et des impressions qui lui sont propres. En Tunisie, ce caractère personnel du voyage peut prendre une dimension particulière, grâce à la richesse culturelle et naturelle du pays. Cependant, l’offre de transport limitée fait que le modèle touristique tunisien reste dépendant des pratiques dites classiques liées à une offre standardisée.
Prenons pour exemple un voyageur étranger qui voudrait faire une courte escapade dans le Nord-Ouest tunisien. Déjà, le principal aéroport, Tunis-Carthage, est paralysé par l’absence de moyens de transport publics. Sans aucune connexion ferroviaire, seuls les taxis individuels peuvent transporter les voyageurs à partir de cet aéroport. Ensuite, ce voyageur devra se déplacer à Tunis pour chercher une correspondance à destination du Nord-Ouest. Plusieurs options se présentent alors, le train, le bus ou le taxi louage. Cependant, ces moyens ne peuvent même pas répondre correctement à la demande locale, que dire alors d’une demande « étrangère », exigeante et spécifique de transport. On l’aura compris, pour un visiteur étranger, il est presque impossible de se déplacer dans les moyens de transport en commun pour découvrir le pays, seul.
Il faudra répondre convenablement à une forte demande
A cet effet, le président de la Fédération tunisienne des agences de voyages (Ftav), Ahmed Ben Taieb, reconnaît que le secteur est sanctionné par la situation du transport terrestre en Tunisie qui reste marquée par l’absence de moyens de transport en commun permettant l’interconnexion des grandes villes. Le problème réside, selon lui, dans la situation du transport public dans le Grand Tunis et l’absence d’interconnexion entre les différentes stations.
« L’activité des agences de voyages est également limitée par des problèmes relatifs au manque de transport touristique et par la situation parfois déplorable des moyens de transport touristique, vu le manque de moyens et les répercussions de la crise qui a frappé le pays depuis 2017 », a-t-il expliqué. « Je vous donne un exemple, le 6 juin prochain, nous allons recevoir deux croisières au port de La Goulette, nous n’avons pas trouvé de bus touristiques pour location en vue de répondre à cette demande », a-t-il déploré. Toujours selon notre interlocuteur, le parc du transport terrestre touristique est extrêmement limité et de plus en plus vétuste. Et d’ajouter que les agences de voyages ne bénéficient plus des privilèges fiscaux pour acquérir ce type de bus.
Outre cette question de transport terrestre, Ben Taïeb explique que la Tunisie ne bénéficie plus de ce que les hôteliers appellent un pont de liaison aérien permettant aux tour-opérateurs de réserver en amont les nuitées et de programmer des vols. « Le secteur ne bénéficie plus de la cartérisation, c’est la location de charters par des tour-opérateurs pour transporter les touristes à petits prix », a-t-il expliqué.
Ainsi, ces problèmes d’ordre structurel nuisent énormément au tourisme tunisien et renforcent sa saisonnalité. « Il faut mettre en garde contre l’effet boomerang, il est vrai que la destination connaît une grande affluence, mais je crains qu’elle ne puisse pas répondre convenablement à cette forte demande », a-t-il conclu, appelant les autorités à mettre en place des stratégies à moyen terme pour y remédier.
La location de voitures, un luxe !
Pour les touristes, une autre option se présente : la location de voitures indispensable si l’on veut explorer librement les sites du pays, allant des plages de Hammamet aux ruines de Carthage, en passant par les oasis de Douz et les montagnes de Matmata.
Cependant, les prix élevés imposent une charge financière supplémentaire. De nombreux visiteurs doivent donc reconsidérer leur budget de voyage, sacrifiant parfois d’autres activités ou réduisant la durée de leur séjour.
Ces dernières années, les prix de la location de voitures ont connu une hausse significative. Plusieurs facteurs contribuent à cette augmentation. La demande accrue, notamment pendant la haute saison, exerce une pression sur les prix.
De plus, la crise économique mondiale et la dévaluation du dinar tunisien ont amplifié les coûts d’importation des véhicules, des pièces détachées et de l’entretien, impacts que les agences de location répercutent sur leurs tarifs. C’est en tout cas ce que confirment les professionnels du secteur qui appellent, à leur tour, l’Etat à préserver leur activité indispensable pour réaliser la performance du tourisme tunisien qui est en train de laisser la crise et les mauvais jours derrière lui.